Dans ce dossier, il ne sera pas question des incontournables du genre. L’Exorciste, Shining et autres Halloween sont ici aux abonnés absents. Place à d’excellents films que l’on a jugé trop méconnus au regard de leurs capacités à nous faire passer une belle soirée à frissonner.
Avant de se lancer dans la lecture de ce dossier, on prévient évidemment qu'il est évidemment loin d’être exhaustif et que l’amateur féroce du genre aura sans doute vu tous les films cités.
Killing ground (2016) de Damien Power
On commence, une fois n’est pas coutume, par un film que l’on peut retrouver sur notre plateforme. Difficile de faire l’impasse sur ce traumatisant film australien qui, à l'image d'un Wolf Creek, va jusqu’au bout de l’horreur. C’est âpre, sombre, surprenant (au détour d’un impressionnant plan séquence, le film prend une toute autre dimension) et difficilement soutenable par moments. On pense beaucoup au grandiose Délivrance sans pourtant que le film de Damien Power ne souffre (trop) de la comparaison. C'est dire à quel point on est en présence d'une œuvre qui pourra vous faire passer à jamais l’envie d’aller camper dans l’outback australien.
Trick’r treat (2009) de Michael Dougherty
Un dossier Halloween sans un film se déroulant pendant Halloween, ce n’est juste pas possible. Cela tombe bien puisque le film de Michael Dougherty est un des meilleurs films à sketchs que l’on ait pu voir de récente mémoire. Sous influence très old school (on pense à Creepshow), Trick’r treat enchaîne les histoires d’égal intérêt (chose rare dans l’exercice), s’appuie sur une direction artistique et une photo particulièrement soignées, ne lésine pas sur les effets sanguinolents, réfute les CGI et nous amuse comme des fous à détourner avec habilité les codes du conte. L’insuccès de l’entreprise fut totalement injuste, la soirée d’Halloween est l’occasion chaque année de rattraper cette anomalie.
Fair game / Mamba (1988) de Mario Orfini
Connu sous plusieurs titres (Fair Game lors de sa sortie discrète au ciné, Mamba pour son exploitation tout aussi discrète en vidéo), le film de Mario Orfini met en scène la femme de Sting, Trudie Styler (très à l’aise) dans un huis-clos des plus stressants. Et pour cause, la jeune femme est enfermée chez elle avec un mamba que son ex (Gregg Henry et sa trogne culte) a placé à son issu dans la maison pour se venger de s’être fait larguer. Un pur exercice de style qui redouble de trouvailles visuelles pour faire monter la tension. On marche à fond et on se prend à regarder dans les coins de notre habitat pour voir si jamais un(e) ex aurait eu la même atroce idée.
Fondu au noir (1980) de Vernon Zimmerman
Très rare, voire invisible en France (aucune édition vidéo à ce jour), Fondu au noir est sans doute le film le plus imparfait de cette sélection. Au point qu’on rêve un jour de voir un remake. Et pour cause, l’histoire totalement méta (un cinéphile pète les plombs et commence à zigouiller les gens qui l’ont contrarié à la manière des films qu’il aime) est tout sauf avant-gardiste dans un univers cinématographique qui passe son temps à s’auto-citer. En attendant, il nous reste à apprécier les multiples clins d’œil (à l’instar d’un Ready player one) que Vernon Zimmerman fait aux classiques d’Hollywood, avoir de l’empathie pour un drôle d’antihéros et s’interroger sur un récit qui dit en filigrane que le cinéma et ses images peuvent engendrer la violence. Une bonne réflexion à avoir au cœur de la nuit d’Halloween.
Body parts (1991) d’Eric Red
On aurait pu aller vers l’excellent La Main du cauchemar, un des premiers films d’Oliver Stone au sujet similaire, mais on a voulu mettre en lumière Eric Red, un scénariste-réalisateur (auteur des scripts de deux incontournables, Hitcher et Aux frontières de l’aube) qui n’a pas connu la carrière qu’il méritait (pour cause de tragédie de vie aussi, le monsieur ayant été à l’origine d’un terrible accident de voiture qui a coûté la vie à deux personnes). Dans ce thriller horrifique adapté très librement d’un roman de Boileau et Narcejac (les auteurs des romans ayant abouti aux chefs d’œuvre Les Diaboliques et Sueurs froides), notre héros (incarné par un solide Jeff Fahey qui lui aussi n’a pas eu la carrière espérée) se voit greffer un bras dont le propriétaire est tout sauf un enfant de cœur. Sa quête pour comprendre pourquoi son bras lui fait faire des choses très répréhensibles donne lieu à toute une série de rebondissements. Et l’occasion pour Eric Red de mettre en place de belles séquences spectaculaires avec en point culminant une poursuite en voitures aussi originale que mémorable.
The Monster Squad (1987) de Fred Dekker
Il fallait dans cette sélection d’Halloween un film grand public que des générations plus jeunes puissent regarder sans risquer le traumatisme d’une vie. The Monster squad répond à cette attente et on peut facilement considérer le film de Fred « on ne te pardonnera jamais l’infâme Robocop 3 » Dekker comme le premier film d’horreur à voir en compagnie de jeunes enfants à cette période de l’année (Gremlins, c’est plus pour une soirée de Noël). Véritable déclaration d’amour sincère à l’Histoire du cinéma fantastique avec ces monstres tout droit sortis des placards d’Universal, le film de Dekker a souvent été considéré à juste titre comme Les Goonies de l’horreur. Cela montre son côté attachant, mais aussi son côté imparfait qui convient si bien à une nuit d’Halloween où les qualités cinématographiques d’une œuvre peuvent passer un peu au deuxième plan.
Dead silence (2007) de James Wan
Avec les Conjuring, Insidious et la saga Saw qu’il a initiée, James Wan est de toute évidence le nouveau roi de l’horreur. Pourtant face à tous ces titres prestigieux, on leur préfère le totalement passé sous le radar, Dead silence. Wan y exprime son amour pour le giallo (on pense plus d’une fois aux Frissons de l’angoisse de Dario Argento) et tout un pan du cinéma d’horreur gothique, notamment grâce à une direction artistique bluffante. Film de fantômes qui fait appel à un univers (la ventriloquie) pratiquement jamais exploité au cinéma, Dead silence a surtout le grand mérite de faire fichtrement peur. Qu’importe quelques facilités, un dénouement un peu tiré par les cheveux et une interprétation très inégale, ce film vaut mille fois mieux que tous les Annabelle de la terre.
Paperhouse (1988) de Bernard Rose
Le chef d’œuvre horrifique de Bernard Rose, c’est Candyman, l’un des plus grands films d’horreur des 30 dernières années, mais avant cela, le réalisateur anglais s’était fait remarquer avec le très beau Paperhouse. Il s’agit d’une œuvre onirique sous influence notamment des Griffes de la nuit (pour le côté plonger dans un monde imaginaire où le danger peut roder) et de La Nuit du chasseur (la jeune héroïne confrontée à ses peurs avec au passage une séquence qui cite directement le film de Charles Laughton). Fragile, certains le jugeront kitsch de manière trop hâtive, mais terriblement beau, émouvant et même effrayant dans sa partie boogeyman, Paperhouse a connu un échec commercial sans appel et a depuis toujours eu du mal à se faire reconnaître comme un des grands films fantastiques de la fin du 20ème siècle.
Les Fantômes d’Halloween (1988) de Frank LaLoggia
Plus connu sous son titre original, Lady in white, le film de Frank LaLoggia (dont c'est le quasi seul long-métrage) possède un équilibre précaire tant il s'aventure dans tous les spectres du cinéma fantastique. Mettant en vedette le Lukas Hass de Witness, le récit fait la part belle à un univers très onirique dont le Peter Jackson de Lovely bones a dû se souvenir. On plonge dans un récit hors du temps, retrouvant l'esprit des plus mémorables histoires de fantômes. Celles que l'on nous raconte au coin du feu et qui nous hantent pour le restant de notre vie. Film d'atmosphère délicatement filmé, Les Fantômes d'Halloween est une œuvre singulière, unique et terriblement attachante. Ceux qui l'ont vu, le chérisse précieusement. A vous de faire partie de la (petite) bande.
Bloody Bird (1987) de Michele Soavi
Dans la droite lignée de son mentor, Dario Argento, Michele Soavi signe un splendide giallo comme premier film. Un quasi huis-clos particulièrement stressant où le sens de la mise en scène opératique se montre même souvent supérieur à certains des meilleurs films de son célèbre devancier. Avec un tueur aussi énigmatique qu’un Michael Myers ou Jason Voorhees, accoutré d’une iconique tête de hibou, capable des pires sévices, les meurtres s’enchaînent avec une efficacité réjouissante, le tout saupoudré de petits effets gore tout aussi stimulants pour les amateurs du genre. Rarement cité comme l’un des fleurons du giallo, Bloody Bird mérite vraiment d’être reconsidéré.
Terreur sur la ligne (1979) de Fred Walton
Peut-être le plus connu de notre liste, qui remporta deux prix au mythique festival du film fantastique d’Avoriaz et connu un remake minable en 2006 signé par le yes man, Simon West. Premier et unique vrai bon film de Fred Walton, Terreur sur la ligne (le titre anglais When a stranger calls étant plus mystérieux) ne tient néanmoins pas totalement la distance. Le milieu du récit reste ainsi un peu poussif. Il y a toutefois une raison pour cela : la très longue séquence d’ouverture est une des plus grandes scènes d’effroi que le cinéma nous ait offerte. Modèle de suspens insoutenable, le film parvient à nous faire sursauter de terreur à la moindre sonnerie du téléphone et on redoute de plus en plus au fil des minutes d’entendre continuellement cette voix lugubre se contenter de murmurer « Etes-vous allée voir les enfants ? ». Jusqu’au dénouement spectaculaire qui nous glace littéralement le sang. Le film parfait pour se mettre en condition pour une nuit d’Halloween !
Angoisse (1987) de Bigas Luna
Le film de Bigas Luna est une pure œuvre cinématographique dans le sens où elle délivre toute son efficacité dans une salle de cinéma (la géniale mise en abyme concoctée par le réalisateur y atteint des sommets vertigineux). Pour autant, découvrir Angoisse chez soi confortablement installer dans son canapé permet déjà de se rendre compte de sa mécanique ingénieuse qui cherche constamment à brouiller les pistes de ce qui se passe sur les écrans. Car, dans ce thriller horrifique qui cite tout autant Hitchcock (le tueur est une sorte de lointain cousin de Norman Bates) que les grands giallos (le Ténèbres d’Argento en tête), il est question de tiroirs et de film dans le film dans le film. On adore s’y perdre, on est terrifié par ce tueur totalement névrosé adepte des meurtres terriblement sadiques et totalement fasciné par une débauche visuelle génialement excessive.
Publié le 31/10/2018 par Laurent Pécha